Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
En balade, né au vent
14 décembre 2014

Balade dans Noël

IMG_0101 comp

Qu'au cœur de l'hiver, aux portes du solstice, on ait besoin de chaleur, de lumière, de couleur, d'amitié, de gentillesse, quand les feuilles sont mortes et que les jours sont courts ; j'en conviens tout à fait, et je vais même jusqu'à penser qu'il n'est pas besoin chaque année d'attendre décembre pour ça ! Mais aujourd'hui Noël s'invite, s'impose, de plus en plus tôt, et de plus en plus vulgairement dans notre quotidien.

fwu4dnt9

Le Père Noël se multiplie, pendouille au balcon, se cramponne au chéneau  ligoté à la guirlande. Ici ou là, on s'est donné tellement de mal à l'accrocher qu'il pend en permanence toute l'année, faisant grise mine en attendant sa nouvelle heure de gloire. Le Père Noël se reproduit à qui mieux-mieux dans les galeries marchandes, sur les bouts de trottoirs, au comité d'entreprise, à la salle des fêtes, à l'école. On le tire en milliards d'exemplaires sur cartes, boîtes, sacs, figurines, bougies ; le voici effigié à l'infini d'un commerce impérieux. Les marchés de noël d'Europe du nord migrent, rejoignant les santons provençaux. Les jouets d'importation asiatique, toxiques, dangereux ou non, inondent par containers entiers les étalages. Les chefs de rayons se mettent en quatre pour s'approvisionner en continu du truc qui fait fureur, dont on parle dans les cours de récréation, et qui se vend comme des petits pains.

6a00d8341ce44553ef0128761ef5a8970c-320wi

Je suis né à Dijon, ville où le Père Noël a été porté au bûcher le 24 décembre 1951.

Ce "rappel historique" ne vise qu'à conforter l'idée que l'unanimité pâteuse et mondialisée d'aujourd'hui autour de cette fête n'est pas toujours allé de soi.

pere-noel brûlé

" Le Père Noël a été pendu hier après-midi aux grilles de la cathédrale de Dijon… et brûlé publiquement sur le parvis. Cette exécution spectaculaire s'est déroulée en présence de plusieurs centaines d'enfants des patronages. Elle avait été décidée avec l'accord du clergé qui avait condamné le Père Noël comme usurpateur et hérétique. Il avait été accusé de paganiser la fête de Noël et de s'y être installé comme un coucou en prenant une place de plus en plus grande. On lui reproche surtout de s'être introduit dans toutes les écoles publiques d'où la crèche est scrupuleusement bannie. Dimanche à trois heures de l'après-midi, le malheureux bonhomme à barbe blanche a payé comme beaucoup d'innocents d'une faute dont s'étaient rendus coupables ceux qui applaudiront à son exécution. Le feu a embrasé sa barbe et il s'est évanoui dans la fumée."  FRANCE SOIR

Il s'en était suivi des réactions d'écrivains célèbres Gilbert CESBRON et René BARJAVEL dans l'hebdomadaire Carrefour (rien à voir avec Mammouth !), et, saisissant l'opportunité d'une analyse ethnologique, Claude LEVI-STRAUSS. Qui, de la fête païenne du solstice d'hiver, ou religieuse de la naissance  de Jésus précède l'autre ? Chez le païen fêtant le solstice, n'y a-t-il pas l'observateur inquiet et médusé adorant les "dieux des éléments" ? Y a-t-il eu concurrence, emprunt ou usurpation, le païen et ses rituels saisonniers ou la religion chrétienne ? Le plus grand vainqueur de cette lutte n'est-il pas un dieu lui aussi païen : Hermès grec ou Mercure romain, dieu du commerce..., voire son descendant selon certains esprits coquins, Coca-cola, le dieu universel américain ?

A cent lieues d'adhérer aux motivations d'une manifestation spectaculaire à connotation religieuse radicale de ce 24 décembre 1951, je suis de plus en plus mal à l'aise quand approche noël. Oubliée la fête de l'hiver, reléguée la célébration religieuse, toutes deux devenues prétextes au plus grand déferlement commercial de l'année auquel même l'hémisphère sud n'échappe pas. Le chiffre du commerce est devenu thermomètre abject, mesurant la fièvre acheteuse, curieusement synonyme de bon moral des français. De là à décréter la bonne santé économique juste histoire de contrer la morosité...

¤¤¤

 

IMG_0105 rec comp

Je pars comme chaque année en quête de lumière, de couleur, de calme, et de grand air. Aujourd’hui, ce sera entre SAVIGNY-LES-BEAUNE et BOUILLAND. Peut-être espérai-je rencontrer le Père Noël, le vrai, celui de mon enfance, rare et surprenant ?

IMG_0102 rec comp

Ce n'est pas la tempête de neige que je trouve, mais ça y ressemble "comme deux flocons" par moment. Les températures sont bien en dessous de zéro depuis plusieurs jours, n'empêchant toutefois pas le Rhoin de cascader toujours au fil de ses méandres, soulignant son étroite vallée.

IMG_0100 rec comp

Etrange sentiment d'être tout à coup, à la fois loin de tout, et si proche ; si proche de chez soi, et si loin de l'oppressant déferlement commercial festif. Au détour d'une haie touffue, derrière une souche pourrissant lentement, je dérange une dizaine d'étourneaux, quelques troglodytes et passereaux ; la nourriture leur est rare et le logis précaire par ces temps glacés.

IMG_0109 rec comp

Dans cet hiver bourguignon aujourd'hui silencieux semblant déserté, je me plais à débusquer la touche de couleur sur une palette plutôt terne.

IMG_0120 rec comp

Bientôt, dans quelques semaines la sève gonflera les rameaux, gorgeant les écorces d'un dernier flamboiement avant le retour du feuillage.

IMG_0110 rec comp

Mais pour l'heure, il faut se contenter de quelques fruits gelés, de quelques feuilles persistantes prenant teinte hivernale, celles d'un lierre rougi de froid, ou d'autres sèches du hêtre, s'accrochant vaillamment au rameau, bravant le poids de la neige.

IMG_0121 rec comp

     C'est dans  Bouilland, puis plus loin encore, que je rencontre le Noël de mon enfance.

Un gamin emmitouflé, les joues aussi rouges que sa combinaison de sport d'hiver, tire lentement sa luge dans la Rue de la Montée si bien nommée derrière l'église.  J'avais repéré les traces des patins dans cette rue qu'adulte on estimerait dangereuse pour la glissade. L'enfance l'emporte sur l'appréciation et la crainte du danger. Je suggère tout de même à Hugo d'avoir de bons freins ; lui m'informe du haut de ses 7 ou 8 ans que les autres, les grands, partent de bien plus loin dans la côte, depuis la croix.

IMG_0117 rec comp

Bien avant de les voir déboucher au détour du virage, je les entends cascader d'éclats en éclats de rires. Culs neigeux par dessus bouilles rougies, les premiers conquérants de la pente passent "à tombeau ouvert" tandis que les derniers, moins téméraires ou plus mal équipés, viennent parfois taper dans le talus. Filles et garçons, experts ou novices de la conduite sur glace, tout au pilotage de la descente de la Rue de la Montée, auront à peine le temps de m'adresser un regard dans un rire aux éclats ou dans l'ébauche du sourire d'une politesse minimale vite rattrapée par la frayeur. 

Le pas lent du montagnard dans la côte, ralenti encore par la tempête de neige, me conduit sur la crête, songeant nostalgique au bonheur de ce noël neigeux offert à la bande des joyeux lutins de BOUILLAND. 

C'est arrivé là, en pleine tempête sur la crête : je perçois le crissement de pas dans la poudreuse, je me retourne..., aucun enfant ne m'a suivi ; je scrute vers l'avant au travers de la tempête, et c'est alors que j'aperçois, sortant de sa cabotte pour aller préparer son bagage et nourrir son attelage,

... mon PERE NOËL.

 

IMG_0118 comp

 

F6 - décembre 2009

(repris en décembre 2014)

Quelques années et semaines plus tard, dans la même vallée du Rhoin, sur d'autres sentiers arrivera : L'avance sur printemps.

Publicité
Publicité
Commentaires
F
J'ai ouvert le site de Fleurus. Efficace, belles photos, il aurait juste besoin de mises à jour... Les Alliacées sont devenues des Amaryllidacées par exemple. <br /> <br /> Sur ton blog, j'ai regretté de ne pas trouver la rubrique "toutes les archives" je suis quand même parvenue à atteindre les premiers messages... pas si anciens que ça finalement... <br /> <br /> Si tu as vu le Renard aux myrtilles tu as dû être ébloui par le large sourire de la foise !!!
F
Les Nénettes sont occupées pour un moment, j'en profite pour roder dans tes pages.. J'ai trouvé des similitudes étonnantes entre nos publications. Les panneaux "avalés" par les arbres par exemple. <br /> <br /> J'aurais aimé offrir une boisson chaude à Madame et Monsieur F6mig que j'ai découverts frigorifiés au sommet de l’Aigoual.
F
Je n'ai plus d'ascendants pour me relater cet événement et me dire le ressenti des dijonnais. <br /> <br /> Chaque année on nous montre des familles à revenu très moyen qui investissent dans ces décos délirantes... leur seul objectif de l'année... un moyen de se maintenir debout de ne pas sombrer dans des déprimes profondes... <br /> <br /> Les fêtes de fin, un moment délicat en famille, tout concilier demande plus d'efforts que cela ne donne de joies. Je souffle quand l'épiphanie arrive !<br /> <br /> Je ne manque pas de fêter le solstice, le retour vers la lumière ça c'est bon !<br /> <br /> Je me souviens avoir effectué une boucle de 22 km autour de l'abbaye Ste Marguerite. C'était par une belle journée glaciale... j'étais avec ma fille, ado, nous nous sommes trouvées dans une chasse... la trouille de notre vie... <br /> <br /> petit détail : j'ai le même sac à dos pour les longues randos, depuis Compostelle c'est rare.
A
Je viens d'aller faire un tour dans les quartiers non commerçants de ma ville et j'ai vu un père noël vraiment moche accroché à un balcon et je me suis dit que ton sac à dos serait 100 fois plus joli accroché à un balcon .J'avais très envie de tirer ce père noël par les pieds :-) Belles ballades même sans neige..Bises
Y
Tout à fait en accord avec toi dans la réflexion sur le Père Noël et toute la symbolique religieuse et/ou consommatrice qui s'y rattache. Quand je vois ces pauvres Pères Noël accrochés aux façades, je me demande toujours s'ils cherchent à entrer ou à s'échapper ! <br /> <br /> Belle ballade dans la fraîcheur et la vérité de ces paysages hivernaux qui font du bien.
En balade, né au vent
Publicité
"Mais en maniant la hache et le passe-partout, j'ai laissé vagabonder mon âme dans l'espace chaud et parfumé, et elle est revenue riche d'une récolte inestimable."
Henri VINCENOT
En balade, né au vent
  • Nez au vent, l'oreille en coin, les yeux curieux, en balade à vélo, à pied, ici et là. Mise en mots, illustrations : F6. Quelques emprunts autorisés, signalés par un lien vers leurs origines. On peut aussi emprunter, en demandant, c'est plus poli.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Newsletter
Archives
Publicité