"Balcons de Bouilland", ou, "Le sentier des orchidées"
A Gilbert, qui, après mon père sensible et déjà bon connaisseur en matière de flore et de faune, a considérablement élargi, enrichi et documenté mon intérêt couvant pour les fleurs, les cartes, les cours d'eau, les cartes des fleurs et des cours d'eau, les récits, les récits de cartes, de fleurs et de cours d'eau... Bon nombre de kilomètres de vélo de jour comme de nuit ensemble, pas assez peut-être, mais suffisamment sans doute, me permettent de considérer Gilbert comme un "repère". Alors que j'étais enfant, mon père ne m'a montré qu'une seule orchidée sauvage qu'il nommait "orchis vanillée"... c'était déjà ça : un bon point de départ ! Ici, Gilbert reconnaitra et expliquera chaque brin d'herbe, chaque feuille, chaque filet d'eau, chaque toit...
BOUILLAND est le village du fond de la vallée du RHOIN, proche de sa source. A 16 km de BEAUNE, la vigne a disparu, cédant la place à un important couvert forestier, à quelques parcelles cultivées ou pâtures enclavées dans un relief très rude.
Arrivant à BEAUNE en 1979 et charmés par la beauté du site de BOUILLAND, nous aurions bien élu domicile dans ce village. Le court de la vie en a décidé autrement, mais nous demeurons "propriétaires" comblés de tant de rendez-vous réguliers avec cette vallée, son cadre grandiose, sa quiétude, les efforts de la marche, les panoramas dévoilés, les images emmagasinées...
Vous avez déjà eu l'occasion de me suivre aux abords de BOUILLAND, et même de lire quelques vers de "poésie académique" de Joseph PETASSE, tout en découvrant l'abbaye de Sainte Marguerite, la Roche Percée, la Combe à la Vieille, ou la Grande Dore. (1) Avance sur printemps
Motivé par un printemps 2015 bien fleuri, et par la découverte récente de Limodorum abortivum (2) dans les Cévennes, certain d'en avoir déjà rencontré là-haut, me voici parti "à la chasse" aux orchidées sauvages printanières. Ma quête aura été fort bien récompensée de 4 variétés différentes dont je vous propose quelques clichés en présentant si possible : la plante dans son ensemble, le bouquet floral, puis enfin le détail d'une, ou de quelques fleurs.
Pour plus d'informations sur chacune, on se réfèrera bien entendu au Fleurier de Gilbert, et plus précisément à la Page des Orchidées (3) où l'on retrouvera mes 4 copines du jour, ainsi que bien d'autres à débusquer.
Orchis de mai ou Dactylorhiza Majalis, occupent la seconde place en termes de nombre d'individus rencontrés ce jour. On remarquera la taille importante du bouquet de forme "cylindrique" et les feuilles tachetées. Les exemplaires d'Orchis de mai rencontrés semblent pour bon nombre en fin de floraison.
Empruntant le réseau des sentiers balisés ainsi que d'autres plus sauvages, je cherche à "tracer" une formule "à la carte" qui pourrait s'appeler "Balcons de Bouilland". Cette balade permettrait au marcheur de s'élever, puis de revenir au village point de départ 1, 2, 3 ou 4 fois, à sa convenance. Compter entre 4 et jusqu'à 20 km, d'une petite demi-journée à une grande journée, entre 140 et 800 m d'élévation cumulée.
La formule est testée pour deux balcons, validée et appréciée par notre petite équipe d'amis en fin d'été dernier. Peut-être bien que le repas "entre deux balcons" dans le sympathique restaurant du village y est aussi pour quelque chose ?
Orchis homme pendu ou Orchis Anthropophora. Contrairement à sa cousine de mai ci-dessus que j'ai pu croiser à l'ombre en sous-bois, l'homme pendu m'a discrètement hélé du milieu de sa prairie ensoleillée : "Coucou, je suis là, ne m'oublie pas" semblait-il dire dissimulé dans les hautes herbes, camouflé par sa teinte verdâtre. Le deuxième homme pendu rencontré disposait certainement d'autres conditions de substrat, ou bien d'aptitudes différentes, à moins que tout bonnement il ne soit moins timide, osant se parer d'une teinte plus voyante approchant le jaune vif. L'homme pendu arrive en troisième position sur quatre espèces pour le nombre d'individus croisés aujourd'hui.
Peut-être bien que le repas "entre deux balcons" au restaurant du village est aussi pour quelque chose dans la satisfaction du groupe de fin d'été 2014..., n'empêche qu'après le repas, il a bien fallu reprendre le chemin de la croix dans la rue de la Montée si bien nommée. Cette rue de la Montée, vous pouvez également l'emprunter enneigée en lisant "Balade dans noël" (4), vous y croiserez de joyeux lutins aux bouilles rougies de froid et aux culs neigeux.
Orchis militaire (guerrier) ou Orchis militaris est de très loin l'espèce la plus représentée au cours de cette balade. Quoi de plus normal me direz-vous : depuis l'invasion romaine en 52 avant Jésus-Christ, le militaire sur notre sol se déplace en légions et vit en régiments. Peut-être, mais alors vous conviendrez avec moi que, mis à part le casque leur valant ce qualificatif de "militaire", l'armée n'est pas bien terrifiante et prendrait plutôt l'allure d'une équipe de joyeux drilles costumés... plutôt que cammouflés.
Ceux qui se promènent ici ne manqueront pas de remarquer des similitudes entre Orchis militaris et Orchis simia (5) ... à revoir absolument, on ne s'en lasse pas ! Au passage vous remarquerez sur le deuxième cliché ci-dessus la fine et élégante torsade de l'attache des fleurs sur la tige. Cette caractéristique semblerait partagée ; à vérifier.
Parmi les attraits multiples des "Balcons de Bouilland" figure cette "cabotte". C'est de celle-là même que j'ai vu sortir mon père noël. Elle vous offrira, en plus de l'abri si nécessaire, le loisir d'essayer de comprendre comment ça peut tenir debout sans la moindre truellée de mortier.
Orchis à odeur de bouc ou Himantoglossum hircinum sera la plus rare et la plus surprenante de cette balade, sauf à ce qu'une pousse aperçue ne me démente prochainement ! Il se pourrait bien qu'un exemplaire de Limodorum abortivum, encore au stade "d'asperge violette" de 15 cm de haut, pousse pratiquement sur la sente au dessus de la falaise de la Grande Dore ; à suivre et à surveiller. Sans conteste, la géométrie de la fleur d'Himantoglossum hircinum est la plus "alambiquée" du jour, quant à l'odeur de bouc, je retournerai humer, promis !
A propos d'odeur, mon sens olfactif, assez fin je dois dire, a discerné une senteur commune avec celle de la Lozère quittée il n'y a que deux semaines. Comme chacun sait, les odeurs, ça ne s'oublie pas. Mais il serait abusif de dire que ce petit coin de Bourgogne sent le Mont Lozère, puisqu'il ne s'agit que du parfum très localisé de la touffe de genêts en fleurs au milieu de laquelle pérore Orchis militaris.
Aucune de nos balades à BOUILLAND n'omet de passer par l'éperon rocheux dominant, d'un côté la Combe à la Vieille, et de l'autre, la vallée du Rhoin. L'accès y est quelque peu périlleux, mais l'impression d'être à la proue d'un navire, dominant vent debout une marée montante de collines feuillues, mérite bien quelques enjambées précautionneuses. Ce 16 mai 2015, la proue du navire était occupée par un couple d'amoureux rejouant peut-être une scène de "Titanic". Dissimulés pour raison de cliché et d'intimité, on ne remarquera d'eux que le petit sac à dos !
Toujours dans l'idée de concevoir cette randonnée des "Balcons de Bouilland", j'avais envisagé d'en enchainer trois aujourd'hui, mais le temps passé à me contorsionner pour photographier autant de belles orchidées ne me l'aura pas permis. Ce temps passé aura été largement récompensé ; ce n'est donc que partie remise pour l'enchainement de trois, puis un jour peut-être de quatre balcons. A moins que, prendre tant de photos et poursuivre tant de senteurs, ne soit aussi la marque d'une certaine usure ?
© F6
mai 2015
NB : Toutes les photos de cet article ont été prises le 16 mai 2015 à l'occasion de la même balade.
(1)
l'hiver a assez duré. Suffisamment long, froid et humide pour que mon dos et mes articulations réclament les bienfaits du rayonnement solaire, pour que mes pensées soient éclairées de luminosité naturelle, pour que des projets plus gais renaissent..., ... j'ai l'honneur de solliciter de votre bienveillance l'arrivée du printemps.
http://f6mig.canalblog.com
(2) Limodorum abortivum
une variété d'iris aux pétales allongés et pointus... - un papillon qui tire la langue... - une fleur d'asperge violette... - une libellule apprentie tombée dans un bol de teinture... - une coiffe de "Blubell girl" du Lido... - de la moisissure de guimauve... - une attention-clin d'oeil pour Perles de Loire alias Alroga ?
http://f6mig.canalblog.com
(3)
(4)
Qu'au cœur de l'hiver, aux portes du solstice, on ait besoin de chaleur, de lumière, de couleur, d'amitié, de gentillesse, quand les feuilles sont mortes et que les jours sont courts ; j'en conviens tout à fait, et je vais même jusqu'à penser qu'il n'est pas besoin chaque année d'attendre décembre pour ça !
http://f6mig.canalblog.com
(5) Orchis simia
De grands bras... De longues jambes et une grande queue... Une tête masquée, casquée, encapuchonnée... Un nouveau déguisement pour le carnaval de Rio ? La panthère rose ? Une jeune costumédienne ("cosplayer") japonaise et son personnage favori de Manga ? je suis une "Orchis simia" ou Orchis singe.
http://f6mig.canalblog.com