"à guérissot..."
" à guérissot, mé y ne sé peu quouais "
Ça guérit, mais je ne sais plus quoi !
C'est ce que se disaient les anciens à propos de cette stèle gauloise qu'ils attribuaient à Saint Ploto, à moins qu'ils parlaient là de l'eau de la source.
Sûr que si elle avait guéri la panne de mémoire, cela se serait su !
Petite parenthèse, si j'ai arrêté d'écrire ici depuis quelques temps, je n'ai pas arrêté de me promener pour le plaisir, et peut être aussi caressant l'espoir d'itinérer un jour pedibus. Je marche plus vite que j'écris... disons que j'ai plus envie et besoin de marcher que de temps pour écrire. Les chaussures et le bas de pantalon croûtés de boue, des clichés ras la carte mémoire, des bribes de pensées, d'observations, d'émotions, de souvenirs ou d'associations plein la mémoire vive... ça s'en va et ça revient, c'est fait de tout petits riens... Fermons la parenthèse. Aujourd'hui j'ai un début, un fil, une fin, et un peu de temps.
On est à ORCHES, à la fontaine du " Châgne " (chêne) dont je découvre la restauration récente en ce dimanche de giboulées. La source est pérenne et alimentait le village en eau jusque dans les années 1950, avant l'adduction au réseau longtemps espérée.
A une lettre inversée près, ORCHES, qui s'abrite le long de la falaise entre LA ROCHEPOT et SAINT ROMAIN aurait bien mérité de s'appeler " ROCHE ". A moins que le hameau ne tienne son nom du porc sauvage, "orcos" en gaulois ?
Les quatre stèles découvertes par des laboureurs à la fin du 19ème siècle, furent d'abord couchées près de la source. Redressées en 1935 sur proposition du fils du président Sadi CARNOT originaire de la région et propriétaire du renommé château de LA ROCHEPOT, elles sont classées monument historique en 1965. Elles proviendraient d'un riche domaine gallo-romain du 2ème siècle, installé autour de la source. Si pour les trois stèles de calcaire les plus petites on s'accorde à parler de dalles funéraires aux personnages vêtus, la plus grande en granit laisse place à interprétations.
Ici en Bourgogne, l'eau de source est si riche en calcaire, qu'elle transforme petit à petit le bois des branches et la mousse en pierre : le tuf calcaire (ci-dessous une tufière).
Mais ce n'est sans doute pas de cette " magie minérale " dont il s'agit ici.
L'homme est nu, petite tête, carrure imposante et larges cuisses, il tient à main gauche un vase au long col incliné et à main droite ??? Que tient-il à main droite ???
Selon nombre d'érudits, il s'agit d'un organe turgescent, autrement dit un phallus en érection. Ils parlent de représentation gauloise de PRIAPE fils de BACCHUS, dieu de la fertilité, protecteur des jardins et des troupeaux aux multiples évocations moins équivoques dans tout le bassin méditerranéen. Ils parlent aussi d'un ex-voto de luxe de la part de quelque malade guéri d'impuissance ou de maladie vénérienne.
Mais, cachez-moi ce... les plus prudes voient dans ce bas relief un Mercure au caducée de facture barbare...
Va savoir... Je reprends ma marche le long des roches tout en réfléchissant à ces interprétations, au paysage de l'époque, aux activités humaines... bref, à des choses sérieuses, quand quelques kilomètres plus loin...
S'agit-il là, accrochée sur le tronc d'un pin noir d'Autriche à deux mètres du sol de la plaque commémorative d'un ébat magistral ?
A moins que plus haut à cinq mètres sur le même tronc, à l'abri des regards d'enfants, ce ne soit...
- l'enseigne d'une péripatéticienne rurale ?
- une oeuvre anonyme d'éros-porno-land-art ?
Les vieux d'ORCHES :
" à guérissot, mé y ne sé peu quouais "...
mais...,
" moué, d'puis tanto, j'savons c'qu'y guérissot ! "
Francis MIGNARDOT
Texte et photos décembre 2012
(importation d'overblog)